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Commentaires sur la Loi sur l’intégrité des élections (C-23)

April 2, 2014

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Le CCPA a été invité à commenter auprès du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet du projet de loi C-23, la loi sur l’intégrité des élections. Patti Tamara Lenard, professeure adjointe en éthique appliquée à l’École supérieure en affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa et attachée de recherches au CCPA, a presenté devant le Comité. Ses remarques sont ci-dessous.

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Je vous remercie d’avoir invité le Centre canadien de politiques alternatives à témoigner devant le Comité ce soir. Je suis professeure adjointe en éthique appliquée à l’École supérieure en affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa ainsi qu’attachée de recherches au CCPA.

Je suis aussi la coauteure, avec plusieurs autres professeurs canadiens, d’une lettre ouverte concernant le projet de loi C-23 parue dans le National Post en mars. Les opinions que je vous présente aujourd’hui sont les miennes et ne représentent pas nécessairement celles des 180 signataires de cette lettre.

Parmi les nombreux problèmes que soulève la Loi sur l’intégrité des élections, j’aimerais en citer un particulier : la façon dont cette loi vient compromettre l’égalité politique au Canada en compliquant l’accès au droit de vote en général et plus particulièrement pour les Canadiens vulnérables, en proposant d’éliminer les répondants et en imposant des exigences plus strictes concernant l’identification de l’électeur.

Je tiens à souligner qu’au Canada, ces exigences sont déjà plus strictes que dans bien d’autres pays. En effet, dans les grandes démocraties suivant le modèle de Westminster, notamment le Royaume-Uni, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, on exige seulement que l’électeur figure au registre; aucune identification n’est requise. Dans d’autres démocraties, les citoyens vulnérables ne sont pas tenus de s’identifier. Selon les meilleures pratiques internationales, les gouvernements qui exigent l’identification devraient s’assurer que les pièces d’identité demandées sont disponibles gratuitement, comme la carte d’information de l’électeur que ce projet de loi veut écarter.

Il faut comprendre que l’élimination des répondants et l’imposition d’exigences plus strictes concernant l’identification de l’électeur nous éloigneraient des pratiques internationales largement acceptées par lesquelles les états protègent le droit de vote de leurs citoyens.

Au Canada, le droit de vote est protégé par l’article 3 de la Charte canadienne des droits et libertés. La garantie constitutionnelle de ce droit nous impose à tous, et surtout au gouvernement le devoir de protéger ce droit pour chacun d’entre nous.

Ce projet de loi sur l’intégrité des élections est loin d’être juste. Il risque d’exclure une partie des citoyens les plus vulnérables du Canada, notamment les aînés et les étudiants, les Premières nations, les Canadiens à faible revenu et les sans-abri. Nous savons par Élections Canada que, dans les récentes élections, ces groupes ont fait appel des répondants. Il va sans dire que, dans la Constitution, le droit de vote de ces citoyens a la même valeur que celui de tout autre Canadien. Il est regrettable que ce projet de loi nous force à le souligner.

Dans sa récente décision dans l’affaire Etobicoke-Centre, la Cour suprême a reconnu les nombreuses valeurs en jeu lors des élections, notamment l’intégrité, la transparence et l’efficacité, puis a donné une place de choix au droit de vote garanti par la Constitution. Je cite l’arrêt : « la Loi a pour objet de permettre à toutes les personnes ayant le droit de voter, y compris celles qui n’ont pas de pièces d’identité, de participer au scrutin et de les inciter à aller voter le jour du scrutin, même si elles ne sont pas déjà inscrites sur la LÉO. Le système est conçu pour être accessible à tous les électeurs et comporte une mesure spéciale pour permettre aux personnes dépourvues de pièces d’identité de voter grâce à un répondant. […]L’accessibilité n’est possible que si nous sommes prêts à accepter une certaine incertitude quant au droit de voter de toutes les personnes qui ont voté. » Autrement dit, le système électoral repose en partie sur la confiance dans nos concitoyens de ne pas abuser de notre droit démocratique le plus fondamental. Ce projet de loi repose sur une fausse prémisse selon laquelle on ne peut plus se fier à personne.

Dans les faits, le projet de loi C-23 privera certains Canadiens de leur droit de vote. Comment peut-on prétendre alors que le Canada est un pays démocratique. Voter n’est pas quelque chose que le gouvernement nous donne la permission de faire, comme conduire, chasser ou exercer la médecine. Nous y avons droit en tant que citoyens. Le travail d’un gouvernement véritablement démocratique est de protéger notre droit en garantissant les conditions qui rendent le vote possible. Cette loi fait le contraire.

Le gouvernement veut restreindre le droit de vote pour lutter contre la fraude de notre système électoral. Comme il a été répété dans les médias, et devant ce comité, on n’a aucune preuve de fraude, sinon quelques erreurs de tenue de dossiers que l’on peut régler sans menacer l’intégrité de la démocratie du Canada.

En gros, le gouvernement propose de nous protéger de dangers imaginaires en créant des dommages réels et importants. Il y a vraiment quelque chose qui cloche si on renvoie des citoyens qui se présentent dans les bureaux de scrutin parce qu’on s’imagine qu’ils essaient de frauder le système. Il y a quelque chose qui cloche dans une politique qui considère des centaines de milliers de citoyens canadiens comme des fraudeurs potentiels, uniquement parce qu’ils sont vulnérables et ont de la difficulté à obtenir un permis de conduire ou à avoir une adresse permanente.

Cette soi-disant loi sur l’intégrité va à l’encontre du principe d’égalité politique – le droit pour tous les citoyens de voter – sur lequel la démocratie du Canada est fondée. Le projet de loi C-23 devrait être rejeté.

Patti Tamara Lenard, École supérieure en affaires publiques et internationales, Université d’Ottawa, et attachée de recherches au CCPA

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